Le titre est bien pesé. Ce n’est pas la césarienne de mes rêves mais bien ma césarienne de rêve car je n’aurais jamais pu imaginer que cette quatrième opération-naissance se déroulât aussi formidablement.
Tout comme ma dernière grossesse s’est passée de façon diamétralement opposée aux précédentes, mon accouchement m’a agréablement surprise voire stupéfaite, moi qui avais à son sujet et à ses suites beaucoup d’appréhension.
J’avais du mal à mesurer que le jour J soit le plus beau jour dans la vie d’une femme, maintenant je le comprends pleinement, son souvenir me laisse en bouche un goût sucré, un ersatz de bonbon au miel réconfortant, une coulée de sirop symbolisant mon chemin vers une certaine révélation de la maternité.
J’ai fait un long chemin de dix sept années, parfois difficiles et tristes, souvent simples et gaies mais il me manquait le point final à mon accomplissement. G.I. Jane, petit bout volontaire, force vitale extraordinaire, est, plutôt sera, ce point final.
L’amour m’a dépassée. Mon corps s’est surpassé.
En premier lieu, je pense avoir très bien fait de rédiger un projet de naissance.
Lors d’une césarienne et au cours de son hospitalisation on est si vulnérable et dépendante qu’il est important de bien formaliser ses souhaits en amont, d’autant que certains petits détails peuvent ulcérer en cas de perte totale d’autonomie.
Par exemple une perfusion positionnée dans l’avant-bras au lieu du poignet et bien cela change tout ! (ça, ce nétait pas du tout prévu dans mon projet mais j’ai grandement apprécié !)
J’ai eu la chance que ce projet soit très bien accepté par ma chirurgienne et respecté. Tous les points avaient été discutés ensemble lors des consultations dans de véritables échanges et j’ai ensuite formalisé par écrit ce dont nous étions convenues. Rien de farfelu et aucune décision prise unilatéralement.
Ce projet m’a aussi permis de me préparer mentalement à la naissance – angoissante pour moi – de mon enfant. Ceci dit, le report de ladite césarienne pour cause de grippe paternelle m’a fait prendre conscience qu’un projet reste un projet, c’est-à-dire une possibilité de.
En second lieu, l’intervention a été réalisée avec brio.
L’anesthésiste a procédé à une rachianesthésie pour laquelle je n’ai pas eu les désagréments associés à celle réalisée pour le Petit Poilu, à savoir sensation de l’aiguille s’enfonçant dans les vertèbres, décharges électriques dans la jambe au moment de la piqûre, chute de tension avec bradycardie (avec impression de mort imminente très désagréable). Les jours suivants, je n’ai pas ressenti de douleur au point de ponction.
En revanche, je fais toujours une réaction à la morphine sous forme de morpions déambulant sur tout mon corps pendant vingt-quatre heures bien tapées.
La chirurgienne a été très douce dans ses gestes pour dégager le bébé et n’a pas brûlé de chair (utilisation d’une technique parallèle) donc il n’y a pas eu cette odeur épouvantable de cochon grillé pendant et après l’opération. L’ensemble de l’équipe a été prévenant et professionnel.
Le fait d’assister avec mon Légionnaire à la sortie de G.I. Jane de mon ventre reste un moment absolument unique et fabuleux. Un simple drap baissé m’a permis de découvrir mon enfant en direct, de le reconnaître de suite, de l’accompagner lors de son premier souffle.
C’était une telle émotion !
Après, le père a fait un malaise en emmenant sa fille pour les premiers soins mais ceci est une autre histoire… (Légio, il m’aura tout fait)
En troisième lieu, pour la première fois, j’ai pu bénéficier de la présence de Légio quasiment en continue et surtout la nuit.
Cela m’a évité la fatigue, des gestes inutiles qui auraient trop sollicité mes abdominaux, le petit coup de blues du soir, de laisser ma fille aux bons soins d’étrangers.
On a pu se gérer complètement et c’était très plaisant pour nous comme pour le personnel soignant (débordé avec les accouchements en nombre avec la pleine lune).
Je sais à quel point il a été mon héros du quotidien. Je lui suis infiniment reconnaissante ainsi qu’à ma belle-mère d’avoir tout mis en oeuvre pour alléger mon séjour à la maternité.
Ces trois points m’ont sans doute permis de perdre vingt ans en vingt heures alors que j’en prenais vingt à chaque fois pour mes précédents accouchements.
Je n’étais pas fatiguée, dès le lendemain j’ai pu me lever sept fois, le surlendemain j’étais déjà sous la douche, toutefois pas en talons à un conseil des ministres (j’ai pas eu la golden césa de Rachida…). Je n’ai pas souffert de douleurs post-opératoires, je n’ai quasiment pas connu de tranchées. Je n’ai presque pas saigné. Ma montée de lait a été parfaite (timing respecté malgré une micro G.I. Jane en hypoglycémie trop faible pour téter et aucun engorgement). Je suis réconciliée avec ma cicatrice et je peux même avouer qu’elle me rend fière (si !) ; je me suis très rapidement réapproprié mon ventre en le pansant, le massant. J’ai aussi dégonflé comme un ballon de baudruche.
Comme quoi l’âge…
Alors, même si on a échappé à la catastrophe parce que mon utérus tricicatriciel n’en pouvait plus, même s’il y a des risques pour une grossesse tardive (de ne pas tomber enceinte, de faire une fausse-couche, du diabète, de l’hypertension, d’avoir un enfant trisomique…), même si ce bébé n’était pas désiré à la base, j’aimerais apporter une lueur d’espoir aux vioques, aux zézettes et futures zézettes balafrées, à celles qui doutent en ce qui concerne la maternité, leur maternité etc.
J’aimerais leur laisser un témoignage positif.
J’adore dire également quand tout va extrêmement bien (sans travestir la réalité) mais c’est hélas chose rare.
Dans la vie il n’y a pas de fatalité et même, des fois, c’est super chouette.
Edit : Si je veux être tout à fait honnête, je dois reconnaître qu’au vu de l’activité multipliée par trois en salles de naissance ce jour-là, les sages-femmes n’étaient pas disponibles et j’ai attendu plus de deux heures en salle de réveil avant de revoir ma fille. C’est le seul bémol que j’ai presque déjà oublié. 😉